Pour décrire les ambitions du fondateur de Google en matière de santé, il faut commencer par une métaphore automobile qui illustre la façon dont Larry Page conçoit la surveillance médicale. Autrefois, lorsqu’il conduisait une voiture, le conducteur savait que les pneus étaient mal gonflés lorsqu’ils éclataient, il savait que le moteur était en surchauffe lorsqu’un panache de fumée s’en échappait… Hormis le compteur de vitesse, il n’y avait guère d’indicateurs en temps réel de l’état de la mécanique.
Aujourd’hui, c’est l’inverse. On ne prête plus attention à la santé de notre moteur parce que justement on sait qu’il est sous surveillance, l’informatique embarquée nous prévient en cas de surchauffe ou de sous-gonflage des pneumatiques, avant même que la panne survienne. Or, en matière de santé, nous en sommes encore au tout début de l’automobile. Hormis nos sensations, nos douleurs, nous ne disposons pas en temps réel de détection, ni de capteurs pour nous informer et surtout prévenir l’apparition des problèmes avant même qu’ils ne deviennent graves.
Étrangement, nous surveillons en temps réel l’état de la mécanique d’un objet automobile (et on n’admettrait pas l’idée de ne pas avoir en permanence l’information sur la surchauffe de son moteur de voiture), mais en revanche nous acceptons encore l’idée de n’avoir strictement aucune information en temps réel sur la fiabilité de nos organes, sur leur surchauffe, sur leur sous-gonflage.
Tel est le constat de base des ingénieurs de Google sous la houlette de Larry Page, qui a recruté les meilleurs spécialistes des biotechnologies de la Silicon Valley. Larry Page et son complice Sergueï Brin ont fait une irruption remarquée dans le domaine de la santé, notamment en créant Calico (California Life Company), une filiale spécialisée dans la lutte contre les maladies et le vieillissement, dont l’ambition, disent les médias, est ni plus ni moins que de « tuer la mort », d’empêcher non seulement l’apparition des maladies mais le vieillissement humain lui-même.
Déjà des applications concrètes
Ce n’est pas d’aujourd’hui que les fondateurs de Google ont décidé de se lancer dans la recherche biomédicale. On entrevoit déjà des applications concrètes. Une des réalisations les plus « simples » est consacrée au diabète en reprenant le concept des lunettes connectées (les Google Glass qui permettent d’intégrer des écrans miniatures directement dans notre champ de vision), mais cette fois avec des lentilles de contact et des capteurs biologiques.
Plutôt que de se piquer perpétuellement, d’analyser leur glycémie à intervalle régulier mais distant, puis d’y remédier eux-mêmes en se piquant…, les diabétiques n’ont pas encore à disposition une assistance en temps réel, une mesure permanente du taux de sucre. Les ingénieurs de Google ont donc conçu des lentilles de contact munies d’un capteur de sucre et d’un émetteur HF : le capteur mesure directement sur l’oeil la glycémie, dans les larmes du patient, transmet l’information par wifi sur une montre et prochainement, un appareillage automatique injectera dans le corps des diabétiques la quantité d’insuline manquante, après mesure automatique sur notre oeil par une lentille intelligente. Pour reprendre la métaphore automobile, il s’agirait d’un suivi en temps réel de notre métabolisme exactement comme le manque d’essence sans besoin de s’arrêter à la pompe.
S’attaquer aux causes du vieillissement et des maladies
Larry Page ne limite pas les ambitions de Google à ce type d’objet. Son ambition est de s’attaquer aux causes du vieillissement et des maladies. « Tout ce que vous imaginez est probablement réalisable. Il vous suffit de le visualiser et d’y travailler », a récemment déclaré Larry Page aux cadres dirigeants de son entreprise.
Larry Page et ses équipes ont annoncé travailler sur la mise au point d’un nano système de détection des anomalies (dont les chercheurs parlent depuis plusieurs années comme une piste de recherche) qui pourrait, chez Google, devenir une réalité concrète dans quelques années. Dans le laboratoire secret où les ingénieurs de Google imaginent le monde de demain, Google X, on travaille à la mise au point concrète de nano-diagnostics.
L’idée de base est la suivante : vous ingérez dans votre organisme des micro-objets, des nano objects, capables de détecter les cellules défaillantes, les cellules mutantes (si vos cellules se dégradent et sont par exemple à un stade pré-cancéreux). Là encore ces nano détecteurs seraient connectés à une montre qui collecte l’information. L’idée est d’avancer au maximum le stade du diagnostic.
Et ce qui est imaginé pour le cancer pourrait être développé pour d’autres maladies. Dans une récente interview, Larry Page a expliqué que l’ambition était bien plus grande en effet. Résoudre le cancer, dit-il, accroîtrait l’espérance de vie humaine de quelques années seulement, alors qu’en revanche, s’attaquer, sur les chromosomes, aux racines du vieillissement permettrait d’atteindre ce qu’on peut appeler la vie éternelle, en tout cas une longévité bien supérieure. Il ne faut pas s’attendre à des annonces dans les prochaines années, c’est un travail de longue haleine car précisément les labos de recherche de Google ont les moyens et la consigne de travailler sur le très long terme.
En résumé, dans le domaine de la santé, Larry Page ne veut pas se contenter d’améliorer à la marge le sort des patients mais cherche ni plus ni moins à révolutionner ce domaine comme il a révolutionné les sciences de l’information. Il est un chaud partisan de ce qu’on appelle le transhumanisme, ou l’homme augmenté, ce qui fait débat chez les penseurs, les philosophes et les religieux, et qui fait peur souvent pour tout ce qui concerne l’intelligence artificielle. Le transhumanisme ne lui fait pas peur, il en a pris la tête avec des moyens en milliards de dollars.
Pourquoi Google s’intéresse à la santé ?
Le fondateur du célèbre moteur de recherche Internet se consacre à la santé pour plusieurs raisons.
– Il y a tout d’abord un sentiment d’injustice ressenti dans sa jeunesse, lorsqu’il était étudiant, quand son père est décédé des suites de la polio, une maladie qui avait quasiment disparu de la surface de la planète mais qui a emporté son père, Carl Page, brillant informaticien.
– Deuxième élément : les problèmes de santé dans l’entourage des fondateurs de Google, (la mère de son acolyte souffre de la maladie de Parkinson) et les inquiétudes sur la santé de Larry Page lui-même, qui est atteint depuis quelque temps d’un mal mystérieux : une paralysie d’une corde vocale, qui lui donne une voix altérée et qui a fait craindre un cancer en affolant récemment les cours de l’action Google.
Enfin il y a la grande ambition, l’ambition d’apporter au monde entier des inventions qui serviront à des millions de personnes. On sait que de plus en plus le « big data » – le traitement d’informations nombreuses et complexes – sera une donnée fondamentale des traitements individualisés du futur. Larry Page, d’abord avec son moteur de recherche, puis avec sa voiture sans conducteur et ses Google glass, a déjà révolutionné plusieurs fois le monde, quoi de plus beau pour un tel homme que de révolutionner la santé humaine, la longévité, au point de chercher à éradiquer les causes du vieillissement et toucher du doigt la perspective divine de la vie éternelle.
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Source : http://www.francetvinfo.fr/sante/decouverte-scientifique/google-et-la-sante-un-nouveau-big-brother_902537.html
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