Cybercriminalité :« la situation française, en terme de ressources humaines, est proche de l’artisanal » |
Un rapport sur la cybercriminalité a été dévoilé le 30 juin 2014, visant à renforcer l’arsenal pénal contre les infractions commises sur internet. Par ailleurs, de prochaines lois pourraient s’en inspirer, comme le projet de loi sur le terrorisme, qui en affiche un certain nombre de traits.
Le rapport de Marc Robert, « protéger les internautes », avait été remis dès le mois de février. L’objectif de cet épais volume : renforcer la lutte contre la cybercriminalité, dont les statistiques croissantes démontrent l’urgente nécessité pour la France de se doter d’un arsenal adapté.
Très rapidement, le rapport dresse un constat cruel : « comparé à ce dont disposent les États étrangers voisins, la situation française, en terme de ressources humaines, est proche de l’artisanal ». Il fait 54 propositions pour pallier ces lacunes.
Certaines d’entre elles tracent des axes de réflexions, mais beaucoup ont de concrètes implications. Pour preuve : le projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme, présenté le 9 juillet dernier à l’Assemblée nationale, s’en est directement inspiré. L’exposé des motifs de son article 12 reprend en substance la proposition n° 15, qui préconise une augmentation du quantum de la peine pour les atteintes aux systèmes de traitement automatisés de données (STAD) et la création d’une circonstance aggravante de commission en bande organisée. Globalement, l’ensemble des dispositions de la loi concernant le cyber-terrorisme, notamment les articles 10 à 16, découlent de ce rapport.
Comme base de toute action, le rapport recommande que des statistiques précises soient établies chaque année, sous l’égide de l’office national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). En 2012, 84 774 infractions ont été recensées par la Police et la Gendarmerie sur internet en 2012, l’immense majorité (84 %) sont des escroqueries, des abus de confiance et des fraudes à la carte bancaire. Mais comme le relève le rapport, « les infractions constatées par les services de Police et de Gendarmerie n’épuisent pas la réalité de la cybercriminalité ». Il faut donc appréhender la cybercriminalité à travers l’action des services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), l’action des douanes ou encore de la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Le constat est sans appel : ces infractions augmentent de manière exponentielle. En 2012, Le montant moyen d’une transaction frauduleuse est de 125 €, celles-ci constituant 0,08 % du total des transactions, et touchant 2,3 % des ménages. Le taux de poursuite, la « réponse pénale » est très faible, et seules 2 222 condamnations ont été prononcées pour des crimes et délits spécifiquement visés par la loi comme faisant partie de la cybercriminalité. Un tiers d’entre eux sont des atteintes aux personnes (délinquance sexuelle, et surtout, en hausse, la pédopornographie) ; un autre tiers est constitué d’infractions à la loi de 1881 (presse). Les si nombreuses infractions aux instruments de paiement ne représentent que 15 % du taux de répression.
Pour mieux lutter contre la cybercriminalité, le rapport s’appuie évidemment sur un volet préventif. La meilleure information du public, l’éducation dès le plus jeune âge à la pratique d’internet, la mise en place de numéros d’urgence sont préconisés. Mais c’est l’appareil judiciaire qui est complètement remodelé : il s’agit, est-il affirmé, de « former les acteurs pénaux, eu égard à la spécificité de la cybercriminalité ». Cette formation interviendrait dès la formation initiale, mais aussi en continu, du fait de la nature fortement évolutive de cette matière. Des magistrats référents verraient ainsi le jour, spécialistes de la cybercriminalité, pour traiter plus efficacement de ce contentieux. Le corpus pénal dont ils disposeraient ne doit pas être « gonflé de lois inutiles » estime le rapport, qui note que l’arsenal répressif est déjà assez complet, et qu’il est indispensable de n’adopter que des dispositions utiles.
L’idée générale est que l’action globale soit coordonnée par une délégation interministérielle de lutte contre la cybercriminalité, la nature protéiforme de ces infractions nécessitant une organisation transversale. Au sein de la justice, c’est une mission de lutte contre la cybercriminalité qui serait créée, rattachée au directeur des affaires criminelles.
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Références :
http://www.dalloz-actualite.fr/flash/cybercriminalite-situation-francaise-en-terme-de-ressources-humaines-est-proche-de-l-artisanal
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